Les Rencontres TTT de Grenoble

Les 1ère Rencontres TTT (en 2007) ont permis de constater le renouveau continuel des enjeux territoriaux mais aussi l’intérêt de reposer la question territoriale dans de nouvelles controverses (celles de l’action collective, de la relative faiblesse des paradigmes fondateurs, du dépassement des anciennes dichotomies, du renouveau démocratique, …).

Les 2ème Rencontres TTT (en 2010) ont focalisé l’attention sur les territoires comme opérateurs de changement ; la prédominance des individus, des trajectoires et des tensions, de la grande labilité des choix territoriaux, mais aussi l’absolu nécessité des ancrages et la prise en compte des héritages ont été mis en regard des obligations de protection, de nécessité de la patrimonialisation et finalement ont renouvelé le rapport individu/politique pendant longtemps considéré comme « évident » dans les sciences territoriales.

Ces  3ème Rencontres poursuivent les investigations autour du triptyque territoire / territorialisation / territorialité en le mettant à l’épreuve de la question hybride.

Thème du colloque

On assiste à un éclatement des temps sociaux, des territoires de vie et des mobilités. Les statuts changent, les échelles et les frontières deviennent plus floues. L’irruption des TIC brouille les rapports entre l’espace et le temps, l’ici et l’ailleurs, le réel et le virtuel, l’individu et les communautés. L’effacement progressif de l’unité de temps, de lieu et d’action des institutions oblige à de nouveaux assemblages. Le « big-bang » des organisations et des territoires entraîne de nouvelles recompositions et nécessite d’autres alliages, alliances ou coalitions.

Métissage, multi-appartenance, hybridation des espaces, des temps et des pratiques deviennent des figures courantes du monde contemporain. L’individu devient « polytopique » et les nouveaux espaces qu’il produit définissent de nouvelles hétérotopies qui hébergent d’autres imaginaires. Les frontières entre temps de travail et temps de loisirs s’effacent. Les métiers uniques laissent la place à des « portefeuilles d'activités ». Le temps du voyage devient parfois un temps de travail (et vice versa). L’appartement se fait hôtel, la ville se transforme en station touristique, alors que la station s’urbanise. On distingue de moins en moins la résidence secondaire de l’habitation principale. Les campings sont habités à l’année et pour quelques heures certains musées deviennent bibliothèques. A Paris, en été, la voie sur berges se transforme en plage alors qu’en hiver la place de la mairie accueille une patinoire. Sur les marges, les délaissés urbains produits par la ville postmoderne sont investis par les exclus qui font mentir l’hypothèse des « non-lieux ». Face à la fonctionnalité et à la spécialisation stérilisante des espaces et des temps, des « tiers lieux » et des « tiers temps » émergent qui réinventent la fonction même des territoires comme lieu de maximisation des interactions, lieu de croisements et de frottements : cafés transformés en bibliothèques, laveries automatiques métamorphosées en café, pépinières associant entrepreneurs et artistes mais aussi toitures transformées en jardins, écomusées ou parcs d’attractions habités, etc. Les nuits urbaines deviennent des jours ou des « non-jours ». Les statuts des individus en mouvement se brouillent en termes de nationalités, d'identités, d'appartenances et de fonctions.  Les frontières entre homme et animal vacillent au point que l'on parle désormais de « droit » pour les seconds. Les prothèses techniques qui nous aident à vivre pénètrent nos corps, faisant surgir la figure du cyborg. Avec l’informatique ubiquitaire, les objets qui remettent constamment à jour leur localisation dans le temps et l’espace, deviennent des produits et services hybrides, des assemblages chimériques combinant des éléments stables et instables. De nouvelles coalitions territoriales multi-scalaires s'inventent à la frontière ou dans l’entre-deux. Des hybrides territoriaux émergent autour de politiques publiques inter-territoriales capables de combiner plusieurs objectifs du développement durable et de répondre à des besoins collectifs jusqu’ici indépendants.

Dans cette société complexe, la tendance est aux alliances et aux collaborations (co-opération, co-conception, co-développement, co-habitation, co-voiturage mais aussi inter et trans-disciplinarité…) qui font émerger des méthodes, des objets, des pratiques et des identités nouvelles. En ce sens, l’inter-culturalité devient une obligation et une nouvelle posture.

Le territoire est au cœur de ces recompositions et hybridations qui convoquent le sensible et l’éphémère. De nouvelles figures émergent, de nouvelles scènes et de nouvelles modalités de coopération apparaissent à différentes échelles et selon des modalités plurielles. Pour répondre aux enjeux, des croisements s’opèrent, des hybridations deviennent possibles. Des artistes se rêvent urbanistes alors que des urbanistes en appellent au sensible et à la créativité. La ville « s’ensauvage » et la nature s’urbanise. De nouvelles questions se posent qui concernent les territoires, les organisations, les pratiques, les individus et les groupes. La complexité des situations, l’imbrication des échelles, la multitude des acteurs concernés nous obligent à changer de regard pour répondre aux défis, imaginer et construire ensemble les modes de vie et les formes de la société de demain dans et par de nouveaux territoires.

Ces mutations qui bouleversent nos habitudes nous invitent à imaginer d’autres formes d’intelligence collective pour observer et comprendre les mutations, analyser les hybrides sociétaux et territoriaux qui émergent et construire de nouveaux modes de collaborations pour la recherche et pour la fabrique des territoires. Nous pensons ouverts et féconds les chemins de l’hybridation aux frontières de la recherche et des pratiques professionnelles, des sciences du territoire et des autres disciplines.

Hybridation, croisement, mixage, métissage, inter-relations (…) Comment dire et analyser le composite ? Quelles sont les significations dans la pensée et la pratique scientifique ? L'émergence de ce concept dans le champ des sciences du territoire (donc de la géographie, de l’urbanisme, de l’aménagement, de l’histoire, de l’architecture, de l’anthropologie et de nombreuses autres sciences sociales, …) traduit la nécessité de penser les articulations, les relations et les imbrications entre objets scientifiques (territoire/réseau, inter-territorialité, entre-deux...). Elle permet de revisiter ces objets aussi bien que les pratiques et les principes de catégorisation.

Dans le cadre d’une approche interdisciplinaire, les sciences du territoire ont besoin de s’approprier la richesse d’un concept, de réfléchir aux conséquences épistémologiques, de confronter les approches et les modes de construction de ces objets hybrides, de mesurer leur intérêt et de discuter de leur pertinence.

Qu’est-ce qu’un hybride ? Quelles sont les hybridations à l’œuvre ? Peut-on parler d’hybridité ? Quel intérêt du concept pour les sciences du territoire ? Comment s’en saisir ?

Luc Gwiazdzinski, Responsable scientifique

Ce sont là quelques questions qui seront traitées au cours de ce colloque à partir des communications soumises et des présentations de personnalités de disciplines et d’univers différents. 


Intervenants : G. Amar, M. Arnaud, P. Amphoux, B. Andrieu, M.C. Bordeaux, N. Boudjelida, D. Bougnoux, J-P. Boutinet, V. Berdoulay, F. Beau, J-M. Besnier, A. Berthoz, A. Berque, S. Bonfiglioli (Italie), D. Breznitz (USA), A. Conjard, S. Cordobes, M. Colleoni (Italie), N. Cattan, P. Chamoiseau, A. Charlot, L. Chicoineau, P. Cinquin, P. Claval, A. Dalmasso, M. Desvigne, R. Favier, C. Ferrari,  A. Gallais, P. Gordiani, , M. Gravari Barbas, S. Gros, E. Hermange, F. Jegou (Belgique), M. Le Floch, J. Gomez Mendoza (Espagne), F. Jaureguiberry, A-S. Jacques, D. Kaplan, Y. Kersalé, P. Mallein, F. Martin-Juchat, C. Maumi , T. Menissier, Y. Moulier-Boutang, P. Mouillon, L. Petit, C. Pontier, G. Rabin, M. Roche, J. Roinat, T. Nghien, A. Sanchez Majas (Suisse), H. Torgue, A. Turco (Italie), J. Viard, J-J. Wunenburger, C. Younes, T. Zeldin (GB) (…).



   

Contacts



Laboratoire Pacte
Cité des territoires
14 bis, Avenue Marie Reynoard
38100 Grenoble – France

ttt3-grenoble@sciencesconf.org
secrétariat : 04 76 82 20 20


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